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solennevillain

Interview de Catherine Martel, multi-expatriée

Dernière mise à jour : 26 juin 2021




Catherine Martel a été expatriée en famille pendant 18 ans, dans plusieurs pays : Turquie, Roumanie, Chypre, Vietnam, Autriche et Bosnie-Herzégovine.


Psychologue de formation, Catherine a travaillé dans tous ces pays, mais pas toujours directement en tant que psychologue, et souvent de façon bénévole : elle a créé plusieurs associations tournées vers l’accueil, participé à des programmes humanitaires ou éducatifs…


Depuis 4 ans, Catherine se consacre à Expats Parents, le site de l’expatriation en famille, et à son groupe Facebook riche de près de 15000 membres. Si vous êtes expatrié.e, vous connaissez sûrement Expats Parents ! Et il y a quelques mois, elle a lancé le site Expat Pro qui référence des professionnels de l’expatriation proposant des services de qualité pour les expats.


Voici donc un retour sur le parcours de Catherine et les défis qu’elle et sa famille ont relevés pendant les périodes à l’étranger, mais aussi lors des périodes de transition en France !





Quelles difficultés as-tu rencontrées en expatriation ?


Les difficultés ont été différentes en fonction des pays : par exemple, au Vietnam, il est vraiment difficile d’apprendre la langue. Dans un autre pays, ce fut l’isolement lié au peu d’étrangers vivant dans le pays. Une autre fois, le fait qu’il n’y ait pas de lycée français pour notre fils qui entrait en classe de première. Il faut donc à chaque fois relever de nouveaux défis, et c’est sans doute ça qui est le plus difficile en expatriation ; c’est aussi ce qui fait la richesse de toutes ces expériences qui nous obligent à nous adapter chaque fois à un nouvel environnement.


Il faut à chaque fois relever de nouveaux défis... Ce qui fait la richesse de toutes ces expériences


J’ai créé un e-book sur les 4 phases que l’on traverse en expatriation (Les 4 saisons de l’expatriation - pour réussir son expérience à l’étranger).


Les as-tu vécues à chaque expatriation?


Oui, je suis passée par ces différentes phases, pas toujours avec la même durée ou la même intensité : cela dépend en effet du pays, mais aussi de votre expérience de l’expatriation, de votre configuration familiale, professionnelle, etc. Et oui, je les ai vécues lors de chaque expatriation.


Je ne sais pas s'il faut chercher à les éviter : je pense que c'est un processus qui doit se faire pour parvenir à une bonne adaptation. En revanche, le fait de savoir comment ça s'était passé les fois précédentes m'a permis de mieux traverser l'automne et l'hiver, sachant qu'ensuite, le printemps arriverait !


"C'est un processus qui doit se faire"



Tu as travaillé dans chaque pays, même avec des enfants en bas âge ? As-tu rencontré des difficultés particulières ?


En Roumanie, je travaillais pour Handicap International, et je pouvais difficilement envisager de mettre ma fille de 2 ans dans une garderie locale ; j’ai donc créé avec une amie roumaine une structure pour accueillir les petits francophones de moins de 3 ans ! Cela remonte à 25 ans ; mon amie s’en occupe toujours et en a fait une petite école maternelle.


En fait, c’est arrivé plusieurs fois que je crée ce qui me manquait, me disant que ça devait également manquer à d’autres : ça a donné lieu à plusieurs associations qui existent encore. Une façon de transformer les difficultés en opportunités de créer quelque chose d’utile !


Sinon, une difficulté, c’était de trouver un travail rémunéré, compatible avec le fait d’avoir 3 jeunes enfants, et de pouvoir rentrer avec eux en France pour les vacances d’été…


"Transformer les difficultés en opportunités"



Quand on est expatrié, on ne peut pas toujours exercer une activité rémunérée. Comment l’as-tu vécu?


Ah, la question du bénévolat : il y aurait de quoi en faire un sujet à part entière !

J’ai eu la chance de ne pas avoir besoin d’avoir un revenu financier pour vivre, car le salaire de mon conjoint nous suffisait. Le bénévolat, ça m’a permis de m’investir dans des projets utiles et qui me passionnaient ; tout le monde ne peut pas en dire autant lors d’une activité où on est rémunéré…


Il m’est tout de même arrivé d’avoir une rémunération lors de certaines de mes activités (cours de FLE, quelques consultations psy, ) ; ce qui est appréciable !


Depuis 4 ans, je suis auto-entrepreneur : je parviens à monétiser un peu mes projets, auxquels je me consacre entièrement ; c’est une satisfaction, qui s’ajoute à celle d’avoir ainsi une activité nomade que je peux exercer depuis n’importe quel endroit de la planète où je peux connecter mon ordi.


Je pense que cette possibilité de carrière nomade séduit de nombreux conjoints d’expats, car elle est particulièrement adaptée à notre vie de nomades.




La plupart des expatriés connaissent Expats Parents ; c’est une référence sur le sujet de l’expatriation. Comment es-tu passée de la psychologie à Expats Parents et, tout récemment, à Expat Pro ?!


Je suis psychologue de formation, mais après avoir travaillé 10 ans en France dans le domaine scolaire puis le recrutement, nous avons commencé notre vie faite d’expatriations successives.


J’ai alors fait plein de choses, pas toujours en lien avec ma formation initiale, même si je pense qu’elle m’a été utile dans les projets dont je me suis occupée. Je me suis beaucoup investie dans la vie associative locale, ce qui m’a permis de découvrir les problématiques liées à l’expatriation et de développer un réseau. Toutes ces expériences m‘ont amenée à constater combien notre vie de mobilité était source de richesse, d’ouverture, mais également combien elle s’accompagnait de défis à relever. J'ai également constaté que les parents étaient vraiment démunis lorsqu'un enfant rencontrait des difficultés d’adaptation, de scolarité, ou autre.


J’ai donc décidé de créer un site collaboratif destiné à aider les familles à mieux vivre leur vie de nomades : c’est ainsi qu’est né Expats Parents ! Outre ce site, j’ai créé un groupe Facebook, qui ne cesse de grossir depuis janvier 2017 ; les parents y posent leurs questions, y partagent leurs expériences, s’entraident… Nous sommes désormais près de 15000 sur ce groupe, et c’est devenu la force du projet.


Au bout de 4 ans, je recevais de plus en plus de demandes de personnes souhaitant donner de la visibilité à leur activité professionnelle destinée aux expats. Je recevais aussi souvent des demandes d’expats à la recherche d’un professionnel connaissant bien les problématiques auxquelles ils étaient confrontés. C’est donc tout logiquement qu’est né récemment le projet Expat Pro, à l’initiative de Cécile Gylbert que je connais depuis 6 ans.


"Richesse, ouverture... mais également défis"


As-tu suivi des formations ?


Non, pas vraiment. J’ai appris sur le tas, comme on dit. Pour le côté web, je m’étais plusieurs fois occupée du site internet des associations dont j’étais membre : j’ai ainsi appris au fur et à mesure, en passant certes pas mal de temps sur des forums pour trouver des solutions aux problèmes rencontrés ; mais ça développe de bons réflexes !


En ce qui concerne la gestion du groupe Facebook, je suis partie de zéro : j’utilisais à peine mon profil Facebook perso ! J’ai fait ça en suivant mon intuition, et en essayant de proposer ce que j’aurais aimé trouver sur un groupe : des ressources, des partages d’expérience, de l’entraide, de la bienveillance…




Quand on s’expatrie en famille, on pense bien sûr à la scolarité des enfants. Comment cela s’est passé pour tes enfants, qui sont maintenant en études supérieures ou dans la vie active?


Nos 3 enfants ont toujours été scolarisés dans des établissements français du réseau AEFE, ce qui permettait de maintenir une continuité pédagogique et académique, au milieu de tous les autres changements auxquels ils étaient confrontés, puisque nous déménagions tous les 3 ans en moyenne. Cela facilitait également les périodes de retour en France, même si ce furent les périodes les plus difficiles pour eux ; mais c’était plutôt sur le plan social que sur le plan scolaire. En effet, ils se sentaient souvent différents de leurs camarades de classe qui, pour la plupart, habitaient le quartier depuis leur naissance.


Seul notre dernier fils a dû changer de système scolaire pour ses 2 dernières années de lycée, car il n’y avait pas de classes de lycée français dans notre pays d’expatriation. Il a dû passer dans le système scolaire britannique, dans une petite école Montessori qui ouvrait juste les classes de lycée : ils étaient 4 élèves, et il a dû préparer ses A levels pratiquement seul, alors qu’il n’était pas bilingue : un sacré défi, à 15 ans ! Ca lui a permis d’acquérir beaucoup d’autonomie, et de devenir vraiment à l’aise en anglais : cela lui est désormais très bénéfique lors de ses études supérieures, puisqu’il a choisi un cursus anglophone !


Une de mes filles, lors du retour en France en fin de lycée, ne s’est pas reconnue dans le système scolaire “trop franco-français” à son goût ; elle est partie étudier à Amsterdam, en cursus anglophone, et se sent comme un poisson dans l’eau parmi des étudiants de toutes nationalités.


Quant à ma fille aînée, après une vie à vadrouiller avec nous, elle a entrepris des études de médecine en France, et vient de les terminer : elle était contente de pouvoir enfin se poser quelque part et pouvoir construire des amitiés durables.


Comme quoi, chaque enfant réagit avec sa personnalité !




Tu es de retour en France ? Comment cela s’est passé ?


Je suis en effet de retour en France, mais avec la perspective d’un nouveau départ, sans les enfants cette fois-ci. Le retour s’est bien passé, dans la mesure où j’ai désormais mon activité nomade, que je n’ai jamais interrompue. Et puis, compte tenu de cette période de pandémie, j’avoue que j’étais bien contente de rentrer en France, et de pouvoir ainsi me rapprocher de nos enfants. Le plus frustrant étant d’être en France sans pouvoir voir les amis et la famille comme on l’aurait fait en temps normal !




Quelle est aujourd’hui ta vision de la vie après avoir découvert autant de cultures différentes ?


Je ne sais pas si je peux prétendre avoir une vision de la vie ! Je sais en revanche que nos expatriations successives ont été de formidables expériences intellectuelles, culturelles et humaines. Je considère comme une chance le fait d’avoir pu mener cette vie, malgré les difficultés que nous avons inévitablement rencontrées. Je pense qu’il faut saisir les opportunités lorsqu’elles se présentent.


"Saisir les opportunités"



As-tu une chanson, une citation ou un livre à partager avec nous, qui t’a marquée, qui t’a aidée, … ?


Oui, un livre que tout parent expat devrait lire ! Le livre de Cécile Gylbert : « Les enfants expatriés, enfants de la Troisième Culture ». Sa lecture m’a permis de mieux comprendre la répercussion de l’expatriation sur l’identité de nos enfants, et sur notre fonctionnement familial. A tel point que, après sa lecture, j’ai contacté Cécile, il y a 6 ans désormais ; nous sommes devenues amies, de façon virtuelle dans un premier temps, et nous avons récemment fondé ensemble le projet Expat Pro !



Merci à Catherine pour ce partage. Une belle capacité à faire de chaque difficulté une opportunité et de voir le côté positif des expériences!



Si vous avez des difficultés à vous adapter à votre pays d’accueil, si vous avez du mal à voir ce que cela peut vous apporter ou encore si vous souhaitez retrouver une activité professionnelle mais que c’est encore flou pour vous, ne restez pas seule et rejoignez-nous sur le groupe des Femmes Expatriées Épanouies et n’hésitez pas à me contacter pour en discuter ensemble.






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